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Refus, Annulation, Rétractation

Refus, Annulation, Rétractation

Rupture conventionnelle : refus, rétractation, annulation

Une rupture conventionnelle, c’est quoi ?

Une rupture conventionnelle est un mode de rupture du CDI créé en 2008 qui est à l’initiative des deux, salarié et employeur. Jusqu’en 2008 n’existaient que le licenciement (initiative de l’employeur) ou la démission (initiative du salarié). La rupture conventionnelle est une sorte de divorce par consentement mutuel : les deux doivent être d’accord pour rompre le contrat de travail. Elle est régie par les articles L 1237-11 à L 1237-16 du Code du travail. La rupture conventionnelle ne s’adresse qu’aux salariés en CDI sans condition d’ancienneté minimale.

La rupture conventionnelle répond à des délais précis :

  • Le salarié ou l’employeur propose la rupture conventionnelle
  • Première entrevue est à j+5
  • Seconde entrevue est à j+10
  • Troisième entrevue et signature de la rupture conventionnelle est à j+15
  • S’ouvre alors le délai de rétractation de 15 jours
  • Fin du délai de rétractation (j+30)
  • Demande d’homologation à la DIRRECTE
  • Instruction par la DIRRECTE
  • Fin du délai d’instruction – homologation (j+45)
  • Le lendemain : rupture du CDI

Dans cet article, nous allons traiter les questions les plus fréquentes :

Un salarié peut-il refuser une rupture conventionnelle que son employeur lui propose ?
Un employeur peut-il refuser une rupture conventionnelle à un de ses salariés qui lui demande ? L’accepter pour l’un mais pas pour l’autre ?
Peut-on se rétracter une fois qu’on a dit oui ?
Dans quels délais ?
Faut-il un motif pour se rétracter ?
L’inspection du travail peut-elle refuser d’homologuer ? pour quel motifs ?

Le point de vue du salarié

Un salarié peut-il refuser une proposition de rupture conventionnelle faite par son employeur ?

Oui.

Le Code du Travail l’indique très clairement : « La rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties » (l’article L1237-11 alinéa 2).

Comment ?

Par écrit.

Nous conseillons aux salariés de faire un écrit pour acter de cette proposition, son contexte et ses conditions si l’employeur les a déjà précisées.

Modèle de lettre de refus de rupture conventionnelle par le salarié :

Par écrit du (…) ou lors d’un entretien informel du (…) vous m’avez proposé de rompre mon contrat par une rupture conventionnelle dans les conditions suivantes (à détailler).

Je vous indique que je refuse la rupture conventionnelle de mon contrat de travail.

Cet écrit, envoyé par LRAR et/ou courriel, à l’employeur, constituera une preuve pour le salarié qu’une rupture conventionnelle lui a été proposée et qu’il l’a refusée. Preuve qui pourra s’avérer utile en cas de licenciement ultérieur. En effet, la rupture conventionnelle ne doit pas être utilisée en lieu et place d’une procédure de licenciement (ex : à la place d’un licenciement pour motif économique, …).

Le salarié peut-il refuser l’indemnité de rupture conventionnelle proposée par l’employeur ?

La rupture conventionnelle du contrat de travail donne lieu à versement de l’indemnité spécifique de rupture prévue à l’article L 1237-13 alinéa 1 :

Le montant de l’indemnité spécifique de rupture, fixée par la convention, ne peut pas être inférieur à celui de l’indemnité légale de licenciement ou, dans les entreprises relevant de branches d’activité représentées par le Medef, la CGPME ou l’UPA, à celui de l’indemnité conventionnelle de licenciement s’il est supérieur (Avenant n° 4 à l’ANI du 11-1-2008 étendu par arrêté du 26-11-2009 ; Inst. DGT 2009-25 du 8-12-2009).

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Le Code prévoit l’indemnité minimale qui doit être versée pour que la rupture conventionnelle soit valable. Mais les parties peuvent tout à fait prévoir une indemnité supra légale supérieure à celle prévue par le Code du travail. Elles le feront dans le cadre d’une négociation. En revanche, cette négociation n’est pas un droit. Si l’employeur refuse d’aller au-delà de la somme que lui impose le Code du travail ou la Convention collective, alors le salarié devra soit accepter la somme en l’état soit renoncer à sa demande de rupture conventionnelle.

Les parties peuvent-elles renoncer au versement de l’indemnité ?

Non. Il s’agit d’une condition de validité de la rupture conventionnelle. Sans indemnité spécifique de rupture, la DIRECCTE n’homologuera pas la rupture conventionnelle. (décision Cour d’appel d’angers 5-1-2010, n° 09-1048 : RJS 2/11 n° 132).

Que peut-il se passer si le salarié refuse ?

En pratique, il est évident que si l’employeur a proposé une rupture conventionnelle à un salarié c’est qu’il souhaite son départ de l’entreprise … Par conséquent, le salarié décidant de rester, il est évident que les relations de travail pourraient devenir tendues. Par ailleurs, si un employeur propose à un salarié une rupture conventionnelle alors que leurs relations professionnelles étaient excellentes jusqu’alors, il peut s’ensuivre un choc psychologique pour le salarié qui pourrait éventuellement entraîner un arrêt maladie de ce dernier. Toutefois, à noter que le refus par un salarié d’une proposition de rupture conventionnelle faite par son employeur ne constituera jamais une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Après avoir signé une rupture conventionnelle, un salarié peut il se rétracter ?

Oui, à deux stades :

  • Avant toute signature de la rupture conventionnelle : l’employeur et le salarié sont en période de « pourparlers » c’est-à-dire qu’ils négocient ensemble les conditions de la rupture conventionnelle et notamment le montant de l’indemnité de rupture conventionnelle et la date de prise d’effet de la rupture.
    A ce stade, le salarié peut formaliser son refus de la rupture conventionnelle à tout moment et sans délai.
  • Après la signature de la rupture conventionnelle : une fois le document de rupture conventionnelle signé (document CERFA), l’employeur comme le salarié dispose d’un délai de 15 jours calendaires (soit 15 jours comprenant les jours non travaillés) pour se rétracter et décider alors de refuser la rupture conventionnelle du contrat de travail.

La rétractation s’effectue par une lettre adressée à l’employeur. Bien que le Code du Travail ne le précise pas, nous vous conseillons de l’adresser par LRAR.

Proposition de modèle lettre de rétractation suite à rupture conventionnelle par le salarié :

Nous avons signé une convention de rupture le (à compléter).

Conformément à l’article L 1237-13 du Code du travail, je me rétracte et souhaite poursuivre mon contrat de travail qui ne prendra plus fin à la date initialement convenue.

Dès lors, la rupture conventionnelle signée le (à compléter) est nulle et non avenue.

Si l’employeur ou le salarié décide de se rétracter : la rupture conventionnelle n’interviendra pas et le formulaire de rupture devra être détruit.
Toutefois, cela n’empêchera pas les parties, lorsqu’elles seront à nouveau d’accord sur le principe et les conditions de la rupture du contrat de travail de signer, le cas échéant, une nouvelle rupture conventionnelle.
Enfin, si ni le salarié ni l’employeur ne se sont pas rétractés dans le délai de 15 jours calendaires il appartient à la partie la plus diligente d’adresser à la DIRECCTE (Direction Régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l’Emploi) le formulaire de rupture conventionnelle.
Depuis peu, cela peut se faire par télé déclaration sur le site travail-emploi.gouv.fr.

Le point de vue de l’employeur

L’employeur peut-il refuser de faire droit à une demande de rupture conventionnelle d’un de ses salariés ?

Oui, l’employeur peut refuser une demande de rupture conventionnelle que l’un de ses salariés lui soumet.

Pourquoi un employeur peut refuser une rupture conventionnelle ?

Sans avoir à justifier du moindre motif de refus.

Combien de fois l’employeur peut refuser une rupture conventionnelle ?

Autant de fois que le salarié lui soumet la demande et qu’il n’est pas d’accord.

Modèle de lettre de refus de rupture conventionnelle par un employeur :

Par écrit du (…) ou lors d’un entretien informel du (…) vous avez sollicité de l’entreprise une rupture conventionnelle dans les conditions suivantes (à détailler).

Par la présente, nous vous informons que l’entreprise n’entend pas donner une suite favorable à votre demande.

Votre Contrat de travail se poursuit donc dans les mêmes conditions.

L’employeur peut il refuser la rétractation du salarié à une rupture conventionnelle ?

Non. L’employeur ne peut s’opposer à la rétractation du salarié dûment intervenue dans le délai de 15 jours calendaires. Il doit en prendre acte et déchirer le formulaire de rupture conventionnelle signé par le salarié et l’entreprise. La rupture conventionnelle ne pourra dès lors valablement intervenir.

L’employeur peut-il se rétracter ?

Oui.

Modèle lettre rétractation par l’employeur :

Le (…), nous avons signé une convention de rupture.

Conformément à l’article L 1237-13 du Code du travail, nous rétractons notre accord.

Dès lors, la rupture conventionnelle signée le (…) est nulle et non avenue, votre contrat de travail devant se poursuivre et ne prenant plus fin à la date initialement convenue.

Le point de vue de la DIRECCTE

Délai d’homologation par la DIRECCTE

À compter de la réception de ce formulaire, l’administration disposera de 15 jours ouvrables pour homologuer ou refuser d’homologuer la convention de rupture conventionnelle. Le silence de la DIRECCTE à l’issue de ce délai de 15 jours vaut homologation de la convention. La date de rupture du contrat de travail intervenant au plus tôt le lendemain de l’homologation de la convention de rupture conventionnelle par la DIRECCTE.

Attention : s’agissant de la rupture conventionnelle d’un salarié protégé (membre du Comité d’Entreprise, Délégué du Personnel, Délégué Syndical, membre du CHSCT), le silence de l’administration vaut refus d’homologation.

La DIRECCTE peut-elle refuser d’homologuer une rupture conventionnelle ?

Oui.

Motifs récurrents de refus d’homologation par la DIRECCTE :

  • le non respect de la procédure de rupture conventionnelle
  • un montant d’indemnité de rupture ne correspondant pas aux dispositions légales
  • ou encore l’existence de plusieurs arrêt maladie précédant la signature de la rupture conventionnelle laissant alors présumer l’existence d’un éventuel harcèlement moral et ou d’une maladie professionnelle

Conséquence du refus d’homologation par la DIRECCTE ?

Dans cette hypothèse, la rupture conventionnelle n’est pas homologuée et le contrat de travail se poursuit.

Peut-on contester le refus d’homologation par la DIRECCTE ?

Oui. Le refus d’homologation est alors contestable devant le Conseil de prud’hommes.

Attention : s’agissant d’un salarié protégé qui souhaiterait contester le refus d’homologation rendu par l’Inspecteur du Travail, il dispose d’un délai de 2 mois pour :

  • soit former un recours gracieux devant l’inspection du travail,
  • soit former un recours hiérarchique devant le Ministre chargé du Travail,
  • soit former un recours juridictionnel devant le tribunal administratif

Si le salarié a signé une rupture conventionnelle qui a été homologuée par l’autorité administrative compétente, la DIRECCTE, peut il demander l’annulation de l’homologation ?

Oui.

Le salarié comme l’employeur peuvent solliciter l’annulation de l’homologation par la DIRECCTE et ce devant le Conseil de Prud’hommes territorialement compétent. Ce recours doit être formé dans un délai maximum de 12 mois à compter de la date d’homologation de la convention de rupture conventionnelle par la DIRECCTE.

Par exemple, la Cour de Cassation a considéré que le harcèlement moral étant une violence morale qui invalide le consentement, toute rupture conventionnelle signée dans un contexte de harcèlement moral est nulle (Cour de cassation 30/01/2013).

Conséquence de l’annulation de la rupture conventionnelle

Le juge prononce le licenciement sans cause réelle et sérieuse et alloue des dommages-intérêts. Ce n’est donc pas la réintégration qui est prononcée.

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